Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Version imprimable +- CSPlive.com (http://new.csplive.com) +-- Forum : Forum CSPLIVE (http://new.csplive.com/forumdisplay.php?fid=3) +--- Forum : Discussions sur le Limoges CSP (http://new.csplive.com/forumdisplay.php?fid=4) +--- Sujet : Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac (/showthread.php?tid=529) |
Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Marcus5 - 21-04-2020 Entrer dans l'équipe dirigeante c'est quand même tout autre chose. Effectivement il y a eu des ratés avec sa boite, mais je pense que jamais son intention n'a été d'entuber le club. Mais il faut donner un respect éternel à ces mecs de 2000, je parle des joueurs. Je ne comprends vraiment pas le problème avec Yann, et cette nouvelle équipe dirigeante. Quand bien même d'ailleurs il y aurait des soucis, je vois pas comment ne pas faire passer le club avant les personnes, et quand on rend hommage à l'histoire du club un mec comme Yann est tout en haut. Je me souviens plus, mais weis et Frigout, qui sont sur Limoges y étaient à ces 90ans? De manière générale il y a quelques types qui sont vraiment pas tendre avec Bonat', je vois pas la raison, et ça me gène particulièrement. Quand le maillot 8 de Murphy a été retiré, perso j'aurais aimé un double ou triple retrait: Murphy-Young-Bonato Pour le triplé de 2000, un truc comme en 2013 aurait été super. Quelle soirée mémorable de ce match contre le Paris Levallois. Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - sylvain87 - 21-04-2020 Fireman a écrit :Surtout que tous les clubs n'ont pas la chance d'avoir un tel historique et palmarès. Ta phrase est réductrice. Sans rouler les mécaniques je crois qu'il serait plus juste de marquer : AUCUN club n'a un tel historique et palmarès. Pour une fois qu'il y a un, truc de simple et d'évident Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Marcus5 - 22-04-2020 En parlant d'anciens match et duels contre Pau, je suis tombé sur cette ITW sympa. https://www.lepopulaire.fr/limoges-87000/sports/freddy-la-griffe-de-la-nuit_12242718/ Il est sympa ce Hufnagel. Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Bada - 22-04-2020 Marcus5 a écrit :En parlant d'anciens match et duels contre Pau, je suis tombé sur cette ITW sympa.c'est clair. Et doublé d'un mec bien, cf sa réaction après la mort de Fred Forte. C'est évident qu'un mec comme ça on l'aurait adoré à Limoges. Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - barra brava - 22-04-2020 Tu parles du mec mis en examen pour des magouilles avec la Préfecture ? Drôle de définition d'un mec bien.... Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Bada - 22-04-2020 barra brava a écrit :Tu parles du mec mis en examen pour des magouilles avec la Préfecture ? Drôle de définition d'un mec bien....par rapport à ce qu'il avait fait pour Forte, oui. Le reste ne me regarde pas. Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Fireman - 22-04-2020 https://www.youtube.com/watch?v=sKgu6lf0WtA Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Jaco11 - 22-04-2020 barra brava a écrit :Tu parles du mec mis en examen pour des magouilles avec la Préfecture ? Drôle de définition d'un mec bien.... Toi la blanche colombe ... :lol: Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - barra brava - 23-04-2020 Jaco11 a écrit :verte la colombe stpl ...mais jamais mis en examen pour corruption active....On a les légendes qu'on méritebarra brava a écrit :Tu parles du mec mis en examen pour des magouilles avec la Préfecture ? Drôle de définition d'un mec bien.... https://www.lequipe.fr/Basket/Actualites/L-ancien-basketteur-freddy-hufnagel-mis-en-examen-pour-corruption-active/1115817 Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Jaco11 - 23-04-2020 barra brava a écrit :Jaco11 a écrit :verte la colombe stpl ...mais jamais mis en examen pour corruption active...barra brava a écrit :Tu parles du mec mis en examen pour des magouilles avec la Préfecture ? Drôle de définition d'un mec bien.... Tu t'es jamais fait prendre ... Bravo !!! Je vais te proposer pour la prochaine "Légion d'Honneur" , des hommes comme toi on en fait plus ... :lol: Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Syl87 - 24-04-2020 ouais enfin pour récupérer des points du permis de conduire, y a pire aussi :lol: Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Marcus5 - 27-04-2020 https://www.youtube.com/watch?v=wdclo1CmHyw Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - hv63 - 27-04-2020 Un grand moment, les chinois et De Peretti !! Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - corsica2b - 07-05-2020 https://www.lequipe.fr/Basket/Article/L-histoire-sur-un-tas-de-pierres/1132560 Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - daveboy - 07-05-2020 corsica2b a écrit :https://www.lequipe.fr/Basket/Article/L-histoire-sur-un-tas-de-pierres/1132560 tous les jours jusqu'à dimanche dans l équipe... Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - daveboy - 07-05-2020 https://www.bebasket.fr/championnat-jeep-elite/entorse-sort-un-livre-sur-le-triple-du-limoges-csp-en-2000.html sympa mais on connait pas la dâte de livraison si on les commande maintenant. si c'est pour les avoir après la sortie du 27 mai..... comme les maillots de l'an dernier.... Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Marcus5 - 07-05-2020 Super en tous cas que l équipe en fasse une mini série. Et ce livre aussi semble prometteur Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - patgauche - 08-05-2020 Le livre semble en effet très intéressant, par contre il faut être abonné pour lire les articles !!!!! Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Jefferson87 - 08-05-2020 patgauche a écrit :Le livre semble en effet très intéressant, par contre il faut être abonné pour lire les articles !!!!! Ou acheter la version papier chez un marchand de journaux. 20 ans après, Ivanovic a refusé de s'exprimer sur le triplé 2000 réalisé avec le CSP. Etrange... Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - patgauche - 08-05-2020 https://france3-regions.francetvinfo.fr/vos-rendez-vous/antenne/noa?r=nouvelle-aquitaine A ne pas louper ce soir Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Yann87 - 09-05-2020 Jefferson87 a écrit :patgauche a écrit :Le livre semble en effet très intéressant, par contre il faut être abonné pour lire les articles !!!!! Ou être solidaires entre nous... Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Yann87 - 09-05-2020 Lâhistoire sur un tas de pierres Au bord de la ruine en janvier 2000, le Limoges CSP et ses joueurs vont sâattacher à vivre jour après jour, entre réductions de salaires et recherche désespérée de financeurs. Les bases dâun ciment collectif qui mènera le club à un triplé magistral. Avant la relégation en Pro B. Il est des histoires empruntées à la légende, des gloires écrites sur des lambeaux. La vie du Limoges CSP 1999-2000 est de celles-là . «Personne nâaurait pu inventer cela», glisse aujourdâhui Yann Bonato, premier rôle et capitaine fondamental de ce roman dâune vie. Cette saison-là , ces cinq mois hors du temps entre janvier et mai 2000 racontent sûrement le plus incroyable, la plus insensée des existences dâune équipe française de sport collectif. Au bout, il y a une réussite sportive phénoménale, un triplé magique, avec la Coupe Korac, la Coupe de France et le Championnat, dans lâordre des titres. Au bout, il y a aussi la mort du vieux roi, celui qui promenait sa silhouette altière depuis 1978 en Première Division, et sa domination pédante dans les années 1990 (cinq titres de champion entre 1988 et 1994), sans toujours marcher droit. Cette saison-là , le Limoges CSP, cathédrale du basket français, champion dâEurope 1993, va partir en fumée, rattrapé par une vie dâexcès, de malversations et de déficits, comme des abcès. La chambre régionale des comptes a ouvert la boîte de Pandore le 22 avril 1999. Pratiques frauduleuses, folie des grandeurs, lâorgane désosse et met à nu. Sur la période 1991-1997, la Saems Limoges CSP est clouée. Le déficit global se monte à près de 30 millions de francs et un homme, particulièrement, est lâobjet de tous les maux : Didier Rose. Ex-joueur du CSP dans les années 1970-1980, devenu un agent de joueurs à succès et un personnage très influent à Limoges, Rose fait et défait les effectifs. Suspecté dâêtre « dirigeant de fait », il niera toujours cette qualification, admettant seulement avoir été « à la marge » lors des différents procès des comptes du club entre 2003 et 2008, qui le condamneront finalement à trente-six mois de prison dont dix-huit ferme et 75 000 ⬠dâamende au pénal. Le CSP, qui sort alors de sa plus mauvaise saison sportive depuis 1980 (7e en 1999, éliminé en quarts des play-offs) est dans la nasse. Le 26 octobre 1999, la brigade financière perquisitionne au siège du club. Le 10 janvier 2000, la machine judiciaire est lancée. En trois jours, le SRPJ entend cinq membres majeurs du CSP : Xavier Popelier, président historique ; Jean-Paul de Peretti, président en activité ; Pierre Pastaud, ex-président ; Jacques Valade, vice-président jusquâen 1995 ; et Didier Rose, incarcéré illico le 12 janvier à la maison dâarrêt de Limoges et qui passera vingt-trois jours en prison. Dès lors, la saison bascule dans le noir. Le club ne va plus quitter son lit de mort et ses acteurs sportifs, joueurs et entraîneurs, vont lui offrir les plus sublimes funérailles. Tous se souviennent de ces premiers jours de janvier. Quand tout sâécroule dans un fracas terrible. Chaque jour à lâentraînement, tandis que Dusko Ivanovic, le coach monténégrin, continue de dicter au bâton les deux séances quotidiennes comme si de rien nâétait, lâéquipe bâtit son jeu sur un amas de pierres. Dans lâéquipe, les jeunes « élèves » de Didier Rose, Stéphane Dumas et Frédéric Weis, sont perdus. « Je suis un gamin de 22 ans. Câest un peu la panique. Didier Rose sâoccupait de tout pour moi et, dâun seul coup, il y a des merdes et le seul mec vers qui je pouvais me tourner ne peut plus me répondre ! En plus, tu as vite des agents qui tâappellent. Les mecs sentent lâodeur du sang », se souvient le pivot limougeaud. Le club agonise. Juste avant le match face à Ãvreux (16 janvier), on vient clouer le cercueil. Le président Peretti parle alors dâun déficit sur la saison en cours de 10 millions de francs. « Le jeudi soir, câest fini. On nous convie à une réunion pour nous expliquer comment va se passer le dépôt de bilan pour le club et le chômage pour nous », raconte Yann Bonato. « Jâai le souvenir de Peretti, arrivant sur le terrain avant lâentraînement pour nous dire : âOn arrête là , vous pouvez rentrer chez vousâ », poursuit lâintérieur David Frigout. Mais câest là , sur des chairs retournées, que la magie va opérer. Face à Ãvreux, Beaublanc soudain se rassemble, comme à ses heures glorieuses. Ils sont 5 300 dans le vaisseau et plus rien nâa de sens. Câest un fatras dâémotions, un tapis dâivresse couché sur un état dâurgence. Tous sâaccrochent à un fil, invisible. Limoges gagne (77-69), les joueurs se rassemblent au centre du terrain comme sâils venaient de conquérir le monde ; Fred Weis pleure comme un enfant. Dans ce désespoir sublime, une histoire légendaire est en train de sâécrire. Désormais, câest au jour le jour. Totalement irrationnel. Les caisses sont vides, la procédure en cours. Au moment de quitter Kiev, en Ukraine, après une qualification aisée en quarts de finale de la Coupe Korac, la carte bancaire du club ne passe plus. Le président, Jean-Paul De Peretti, fait au mieux. En place depuis 1996, il nâavait pas vraiment la vocation. Lâhomme a 55 ans et une belle réussite entrepreneuriale. Mais il semble dépassé par les événements, rattrapé par un démon bien plus gros que lui. Son milieu, câest la rame, lâaviron. Alors il brasse, remue le tissu économique local qui se terre, alerte les collectivités, éternel- les piliers, qui hésitent à se mouiller un peu plus désormais. Peretti nâa pas tous les codes, mais il a le sens du devoir. « Je nâai aucune rancune, aucun regret, résume-t-il vingt ans plus tard. Jâai démarré en étant un homme de bonne volonté. Vous mettrez sur ma tombe : âJP, un homme de bonne volontéâ», clame-t-il. Une baisse de salaire de 70 % pour Bonato et Weis Lâhomme est un exalté, un bagarreur. Il gratte ici quelques millions auprès de la mairie, en met un de sa poche aussi, lance une souscription pour offrir quelques jours de vie supplémentaires au club. Mais il se sent un peu seul sur le champ de bataille. « Le bateau était presque vide, parce que tous les rats étaient partis. Jâai été Don Quichotte, du Guesclin, Ivanhoé, Robin des Bois, tout à la fois ! Mais je ne suis pas si couillon que jâen ai lâair. Jâai mis la main dans la machine et je voulais finir. Quand on mâa dit : âM. De Peretti, on sera près de vousâ, là jâai été naïf certainementâ¦Â», relate-t-il aujourdâhui. Dans le désordre, Peretti redonne de la vie. Celle quâune bande de joueurs souffle tout le mois de janvier, dans le sillage dâun coach imperturbable et dâun capitaine exemplaire. Au-delà du terrain, « Bonatâ », hier attaquant soliste, embrasse la fonction dans ce quâelle a de plus totale. Dans le vestiaire, on lâécoute. à ses hommes, il propose une diminution de salaire, seul pansement étanche pour aller au bout de lâaventure. Tous acceptent, même si les deux Américains, Marcus Brown et Harper Williams, ne sont finalement pas impactés, pas plus que Stéphane Dumas et Thierry Rupert, les deux plus petits salaires de lâéquipe. En revanche, pour Bonato et Weis, les deux mieux payés du lot, câest â 70 % tout de même ! « On sait de quoi il retourne, câest un problème de fric. Alors allons-y ! On nâa pas réfléchi très longtemps, dâautant que lâon gagne », assure le vétéran du groupe, Jean-Philippe Méthélie. Derrière la déflagration du 10 janvier, Limoges enchaîne huit succès de rang en un mois (avant de tomber à Dijon le 12 février), dont un à Pau et un en quarts de finale aller de la Coupe Korac face à Ankara (71-57), qui claquent comme des actes fondateurs. Le club se disloque, mais Ivanovic et ses hommes nâont quâune seule obsession : aller au bout de lâhistoire. Leur histoire. « Avec Harper (Williams), on voit ce qui se passe, la ville, les fans, toute cette agitation. Mais on voit surtout nos frères dans la bagarre et on nâa pas envie de leur tourner le dos. Je nâoublierai jamais ces moments-là », se souvient Marcus Brown, lâémotion toujours à vif. Les entraînements sont une souffrance, les soirs sont des angoisses, mais lâéquipe se resserre chaque jour. Les joueurs dînent ensemble et Beaublanc redevient une terre de feu. « Tous les matches, câest lâarène, câest le dernier. En Coupe dâEurope, une demi-heure avant, les gens chantent la Marseillaise. Cette Marseillaise, câétait un cadeau. On sâentraînait pour vivre ça. Câest un moment pour les héros. Ãa dépasse le sportif. On rentre dans un truc mystique. On était prêts à mourir », se souvient Bonato. En finale aller de la Coupe Korac, face à Malaga, coaché par Bozidar Maljkovic, le sorcier du titre européen de 1993, le CSP tutoie le sublime. Il sâimpose de 22 points (80-58) dans un soir irréel, où lâentraîneur des Andalous quittera le palais des sports sous escorte policière sitôt la fin de sa conférence de presse, pour être entendu dans le cadre de lâenquête sur la gestion passée du club limougeaud. Au milieu des gravats, les héros avancent. à Malaga, en finale retour, passées sept premières minutes de frayeur et 13 points de retard, le CSP sâincline (60-51) mais décroche la troisième Coupe Korac de son histoire. à lâaéroport de Bellegarde, ils sont plus de 3 000 agglutinés dans le hall. Il est près de 3 heures du matin et la ville ne voulait pas sâendormir avant dâavoir embrassé ses héros. à Paris, le 30 avril, en finale de la Coupe de France, le CSP maîtrise Paris (79-73) et empile un deuxième trophée. Ce groupe nâa plus dâavenir, chaque promesse est une pièce jetée en lâair, et pourtant il gagne, encore. « On avançait, on était une armée. Comme si tout était parfait dans lâimperfection», raconte Stéphane Dumas. En coulisses, Peretti sâébroue toujours. Cette fois, il a reniflé une piste asiatique, un consortium bancaire, LangTon, basé entre Hongkong et Singapour, qui promet 40 millions de francs sur trois ans en échange dâune tournée annuelle et de la formation de quelques joueurs nippons. Câest nébuleux, miraculeux. « La piste asiatique a existé, confirme-t-il aujourdâhui. Je suis allé à Saint-Julien, à côté de Genève, avec mon directeur financier (Xavier Bonnafy), qui nâest pas un imbécile. On a rencontré un porte-parole. On a eu un autre rendez-vous ensuite à Paris. Lâargent devait arriver, on avait même reçu quelques jours plus tard un papier nous indiquant que lâargent était en séquestre chez un notaire. » Mais lâargent ne sera jamais versé⦠Entre-temps, Limoges sâoffrira une dernière couronne, une mort en apothéose. Un neuvième titre de champion de France, sur le parquet de lâAsvel, lors du match dâappui, le 27 mai 2000 (66-78). Un troisième trophée pour parapher une saison inqualifiable. Avant que le club ne soit recouvert de terre et relégué, un mois plus tard, en Pro B. Le plus fort dans tout cela, câest que le club va se relever. Se noyer encore en 2004, puis ressusciter, pour remporter deux nouveaux titres nationaux (2014 et 2015) ! Comme si une vie ne suffisait pas au CSP.Vingt ans plus tard, les héros nâont jamais vraiment quitté le bord de la route. « Câest la saison la plus invraisemblable de ma carrière. Câest un truc que tu souhaites à tout le monde de vivre. Après cette saison, jâai cherché perpétuellement cela sans jamais le retrouver », confesse joliment Fred Weis. Pour Marcus Brown, cette histoire, ce roman de bravoure, méritait une autre fin. «Cette équipe a été privée dâun grand destin⦠» Limoges CSP 1999-2000 Président : Jean-Paul De Peretti. Entraîneur : Dusko Ivanovic (MTN). Lâéquipe 4. Stéphane Dumas 5. Marcus Brown (USA) 6. Bruno Hamm 8. Yann Bonato 9. Stjepan Stazic (AUT) 10. Zaka Alao 11. Jean-Philippe Méthélie 12. Thierry Rupert 13. Harper Williams (USA) 14. David Frigout 15. Frédéric Weis 16. Frédéric Adjiwanou Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Yann87 - 09-05-2020 Ivanovic, lâemprise et la maîtrise Entraîneur du Limoges CSP 1999-2000, le coach monténégrin a marqué le club de son empreinte. Intransigeant, obsédé par le travail et le jeu, Dusko Ivanovic a tenu son groupe dâune main de fer et offert trois titres au club, quand lâédifice tombait chaque jour un peu plus en morceaux. Il nâa pas tremblé, pas vacillé ni même esquissé le moindre geste. Autour de lui, les murs se fendent, le club sâeffondre. Le siège social est un repaire de miséreux qui mendient le sou, qui raclent les tiroirs pour «nourrir la bête» un ou deux jours de plus en espérant un miracle. Le Limoges CSP traîne à terre ses flancs meurtris et sue à grosses gouttes ses gloires passées et ses délits cachés. Depuis le 10 janvier 2000, la saison nâa plus vraiment de sens. Chaque jour est une fin de vie et on tend lâoreille, par réflexe, dans la crainte dâentendre sonner lâhallali. Pourtant, un homme reste fixe. Campé. Inébranlable. Dusko Ivanovic a 42 ans. Il est un jeune coach qui a fait ses premières classes sur un banc suisse, à Fribourg. Ainsi présenté, ça ne claque pas au nez. Mais il est surtout le fils spirituel dâun certain Bozidar Maljkovic, lâenchanteur serbe qui a porté aux nues européennes le CSP un 15 avril 1993, offrant au sport collectif français son premier titre de champion dâEurope. La descendance a du grain. Le joueur Ivanovic en a récolté de beaux fruits, remportant, en tant quâarrière du grand Split, deux titres européens majeurs en 1989 et 1990. Quand il arrive en Limousin, à lâété 1999, le Monténégrin au regard dâacier sait déjà où il va. Limoges, il connaît même un peu, puisquâil y joua, toujours sous les ordres de Maljkovic, cinq matches à la sauvette en début dâexercice 1992-1993, en tant que joker médical de Jurij Zdovc. Un passage éclair mais remarqué, à plus de 14 points de moyenne. Ceci est pour lâanecdote. Le fond de lâaffaire est ailleurs, plus profond, dans une posture austère, une exigence froide, des convictions incassables, où il semble avoir scellé le trésor. Aux premiers temps, cela va désarçonner le groupe et lever les boucliers de lâinimitié. « Physiquement, la préparation est très dure. à Font-Romeu, on va faire le footing à 6 heures du matin, sans petit déjeuner. On est tous très surpris. On pense quâil est complètement barjot ! Il nous dit : âMa porte est ouverteâ, mais en fait, elle est fermée. Il est intraitable. On souffre beaucoup au début », raconte Jean-Philippe Méthélie. De par son statut de capitaine, Yann Bonato est au parfum. Il doit adhérer, relayer, ne pas broncher. « La relation avec Ivanovic est très professionnelle, très respectueuse. Câest un jeune coach, qui nâa pas encore le recul par rapport à la quantité. Physiquement, je trouve cela exagéré. Mais je sais pourquoi. Câest mon troisième ou quatrième coach âyougoâ. Je sais ce quâil attend de moi. Dès le début de saison, il me parle dâexemplarité. Câest très pro », se souvient Bonato. Très vite, Dusko Ivanovic attire les foudres et concentre la fronde en sourdine de la quasi-totalité de lâéquipe. Mais il nâen a que faire. Lâemprise est presque totale, sans concession. Le coach a les codes. Il sây tient. Dans lâavion, il somnole le buste droit, les bras croisés. Ce nâest pas un simulacre, câest une partition. Quand le club implose, il nây a quâun endroit où la déflagration nâest pas entendue, où lâon souffle la vie, câest au palais des sports de Beaublanc. Là -bas, chaque samedi on joue les pièces mises en scène par Dusko Ivanovic. Pour tous, cette saison est dâabord une incroyable aventure humaine, une quête dâabsolu dans un lacis de sentiments contraires. Câest précisément ce qui va tendre et forger la relation entre le coach et ses joueurs tout au long de lâannée et, plus radicalement encore, à partir de janvier quand, autour de lâéquipe, câest la débandade. Lâavenir est en lambeaux, le SRPJ cogne aux portes et pourtant, dans lâintimité dâun vestiaire où lâon vitupère sans cesse contre un entraîneur tortionnaire, lâéquipe est en train de se fabriquer un destin. Au cÅur de la tempête, elle gagne huit matches dâaffilée entre la mi-janvier et la mi-février, accepte une baisse de salaires drastique et les joueurs se soudent les uns aux autres. Ivanovic, lui, ne cède rien, ne concède rien. à Kiev, malgré un succès de plus de 20 points et une qualification en quarts de finale de la Korac, il fait lever ses hommes à 7 heures du matâ, pour deux heures dâentraînement avant de décoller ! «Je me souviens, on a travaillé la défense de zone, se marre Stéphane Dumas aujourdâhui. On lâinsultait à tue-tête, on en avait marre de sâentraîner sans salaire quasiment. Lui disait que ne pas être payé nâétait pas une excuse pour ne pas sâentraîner. » Au tour suivant, au retour dâAnkara, après un réveil à 4 heures du matin et plus de neuf heures de trajet, Ivanovic ne lâche pas ses hommes sur le tarmac et emmène illico sa troupe pour deux heures dâentraînement à Beaublanc. Sans un mot ou presque. « On lâappelait le requin ! Il avait une tête impassible, jamais un sourire. Dans le vestiaire, pour nous rassurer, âJean-Phiâ (Méthélie) nous disait : âIl ne peut pas nous tuer les gars, il ne peut pas nous tuer !â Chaque fois quâon mettait le cul sur le terrain, on savait quâon allait en chier. Et quand on croyait que câétait fini, câétait son poisson-pilote (lâassistant Drasko Prodanovic) qui prenait le relais : âAllez encore cinq minutes, petits, cinq minutes !â Câétait les minutes yougoslaves, ça durait une demi-heure, câétait du physique, des sauts, des montées de gradins, tu avais juste envie de lâinsulter », raconte David Frigout. Lâhistoire sera rude et chahutée avec Marcus Brown. Lâarrière star du CSP, qui sâest rompu les ligaments croisés du genou une grosse année auparavant, est ici en réhabilitation. En quête de jeu, pas pour martyriser son corps. Les deux hommes sâopposent verbalement, fréquemment. Vingt ans plus tard, Marcus Brown ne nourrit aucune rancÅur. Même sâil nâa pas tout compris, il ne retient que la grande histoire. « Son job était de coacher, mon job était de jouer. Il pensait dâune certaine manière, je pensais dâune autre. On venait de deux mondes différents, mais le basket est universel. Tu nâas pas besoin de parler le même langage pour comprendre le travail qui doit être fait. Et on a fait le travail », résume aujourdâhui lâentraîneur de West Memphis (HS), son ancien lycée. La relation est sur un fil. Ce sont des funambules. Fin mars, à Malaga, quand le CSP remporte la Coupe Korac, validant ainsi le travail enduré jusquâici, il y a dans les gestes de joie et les éclats de bouteille dâeau le désir, à peine voilé, de se défouler, dâévacuer. La cible choisie naturellement est le coach. « On a tous pris une bouteille dâeau, on a défoncé Dusko comme des cons ! On lâa aspergé avec tout ce qui nous passait sous la main. Mais il y avait des jets dâeau qui partaient un peu violemment» , concède Frigout. « Câest sans doute un peu mesquin, quand on lui jette les bouteilles dans le vestiaire, mais câest tout ce que lâon peut faire. Il a été très durâ¦Â», résume Méthélie. Sur le moment, il y a un sentiment en lisière de la haine. Dâautant quâà chaque retour de déplacement, Ivanovic, lâhomme qui, avec ses joueurs, ne termine jamais ses phrases par un sourire, embrasse comme du bon pain sa femme venue le « cueillir » à lâaéroport de Bellegarde à Limoges. « Il lâenlace, il lui roule une putain de pelle, un truc de malade ! On était sur le cul. Ce nâest pas le gars quâon connaît, qui vient de te laminer pendant des mois, dans tous les sens. Câest surréaliste ! », conte Frigout. « Ce quâil ne nous donnait pas à nous, il le donnait à sa famille. Un robot sur le terrain, de la guimauve dans la vie», confirme Fred Weis. Mais dans ce rapport de force entretenu, accepté il y a, en creux, une réelle forme de clairvoyance de part et dâautre. Quand Ivanovic martèle, il y a vingt ans : « Câest obligatoire de sâentraîner dur. Si on ne sâentraîne pas dur, on nâest pas prêts, on ne peut pas jouer.» Vingt ans après, les joueurs confessent unanimement que câest bien ce bonhomme aux contours rudes qui les a portés là -haut. Dans lâopposition et la grogne, il leur a forgé un mental, comme le reconnaît Fred Weis aujourdâhui : « Dusko Ivanovic a été exceptionnel. On avait besoin dâun guide et lui nous a tellement verrouillés que finalement on jouait au basket, on était des machines. Câétait bon pour nous, de le détester. Sans cela nous nâaurions pas pu avancer. Sâil avait fait autrement, sâil nâavait été que dans le ressenti et lâaffectif, on aurait explosé en vol. Je remercie Dusko Ivanovic dâavoir été comme ça. Avec le recul, je me dis quâil a eu mille fois raison. Sur le coup, tâes pas payé, tâes stressé, ça ne va pas, tu as besoin dâune tête de Turc : le coach ! Le coach, câest un connard, il nous fait trop travailler. En réalité, il était surtout notre moteur. Merci Dusko, je ne sais même pas comment lui dire⦠» Et puis, techniquement, tactiquement, le bonhomme est un pointu, un expert. Si Limoges ne présente pas un jeu chatoyant, en revanche tout est pensé, étudié. « Le jeu était très simple, la hiérarchie parfaitement définie. Chacun respectait son rôle », résume Stéphane Dumas. Seul joueur, avant cette saison irréelle, à avoir gagné des titres, Jean-Philippe Méthélie admet que les succès du CSP, cette année-là , ont été bâtis en grande partie par son entraîneur : «On sait tous ce quâon lui doit et on lui doit beaucoup. Il était tellement pointu dans son truc. Un tel niveau de perfection sur chaque joueur, je nâai jamais vu ça, ni avant ni après dans ma carrière.» Pour Yann Bonato, Dusko Ivanovic était de la grande école « yougoslave ». Il avait la fibre. « Ce nâest pas un basket flamboyant, câest un basket âyougoâ, un basket de stratégie, qui te prépare pour les grands matches. Tout ce quâil nous demande, au sens tactique, est dâune précision, dâune intelligence. Dès quâil nous parle de jeu, jâai un immense respect », avoue le capitaine limougeaud, qui devra attendre le dernier match de la saison, celui du sacre de champion à Villeurbanne, pour que son coach le prenne enfin dans ses bras, à quarante secondes de la fin. Dusko Ivanovic connaîtra dâautres succès ensuite. à Vitoria notamment, où il disputera deux finales dâEuroligue (2001, 2005) et remportera deux titres de champion dâEspagne (2002, 2010). Mais, vingt ans plus tard, lâaventure limougeaude cogne toujours comme une émotion vive, un peu troublée dâailleurs. Ivanovic a visiblement souffert de cette image froide dans laquelle il fut souvent dépeint. Câest par écrit quâil sâest un peu livré, préférant ne pas trop en parler. « Le CSP Limoges a réussi un des plus gros exploits dans lâhistoire du basket, et même dans le monde du sport en général. Câest une histoire de réussite sportive, mais aussi dâabnégation, de noblesse, de force mentale et physique, de moral, mais aussi de sacrifice sportif. En bref, câest une histoire de culmination tant sur le plan sportif que le plan humain. Je porterai toujours le CSP Limoges, la ville de Limoges et les gens que jâai côtoyés dans mon coeur. Après tant dâannées, tous les acteurs et les spectateurs ont évidemment leur propre vision de cette histoire, car elle a été vécue à travers des points de vue très différents. Ceci dit, je suis sûr que toutes ces histoires, quelles quâelles soient, sont toutes belles », écrit-il. La sienne lâest donc aussi... Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Yann87 - 09-05-2020 Bonato, la flamme dâune vie Talent majeur et capitaine fondamental de lâépopée du CSP en 2000, lâailier sâest totalement révélé à lui-même cette saison-là . En pleine tempête, lâattaquant soliste sâest mué en un meneur dâhommes exemplaire, engagé et altruiste, portant la vie, les angoisses et les rêves du vestiaire et de tout le peuple limougeaud. Vingt ans ont passé, mais il cherche toujours. Avec un certain délice, une réelle fierté aussi. Lâaventure 1999-2000 du Limoges CSP, pour Yann Bonato, câest la flamme dâune vie. Câest, dans sa plus majestueuse expression, au plus profond de son être, ce pourquoi il était véritablement fait, ce pourquoi il était là finalement, sur ces planches de bois, quâil battait autrefois dâun pas de soliste effronté, sans but précis, sans trop savoir où cela allait lâemmener. Cette année-là , dès lors que la vie du club a basculé, que les façades de la cathédrale se sont fissurées, le capitaine est resté digne et debout. Il sâest élevé, dans un regard féroce, une posture nouvelle. Dâun doigt tendu, il a montré le chemin et tous ont suivi. Son altruisme, comme une offrande soudaine, a embrasé le vestiaire, Beaublanc, les villes et les campagnes alentour. Sans jamais se départir de son côté révolutionnaire, le bras levé, dépoitraillé et les jambes en travers, fonçant jusquâau dernier souffle sur les barricades adverses, Bonato a donné à sa carrière et à sa vie dâhomme une dimension unique, humaine, presque mystique, quâil nâavait sans doute jamais effleurée auparavant. Son jeune partenaire à lâépoque de ces hauts faits, Stéphane Dumas, pose un temps de silence et dit aujourdâhui, comme on signe un livre dâor : « Le club, pour moi, câétait Yann ». Ces derniers jours, Bonato a creusé. Pour déterrer les raisons profondes, les racines qui lâont fait ainsi en 2000. Une introspection, pour une révélation, vingt ans après. « Je nâaime pas trop gratter mon cerveau qui est un petit peu fragile », sourit-il. « Mais dâaprès moi, objectivement, le changement se fait à lâétranger. Limoges oui, mais si on parle de changement, de prise de conscience, de maturation, câest à lâétranger. » En Italie, précisément. à Pesaro en 1997-1998, puis à Reggio Emilia la saison suivante. Là -bas, lui lâattaquant qui faisait danser les défenseurs du Championnat de France sous le maillot du PSG et de Limoges première version, à plus de vingt points de moyenne, les quatre années précédentes, se retrouve à lâisolement. à Pesaro notamment, lâhistoire est assez violente. Bonato passe même tout près dâun drame, au retour dâun déplacement à Rimini. « On a pris une trempe, on rentre en car. On se retrouve les trois étrangers au fond, Troy Truvillion, Andrés Guibert et moi », raconte lâailier français. « à lâarrivée, il y a une centaine de supporters âtrès en formeâ qui nous attendent. On se retrouve comme dans les mauvais films de série B, dos à dos avec ces personnes avinées qui veulent nous punir ! Alors, pour échapper à ce guet-apens, Guibert sort un énorme couteau et le met sous la gorge dâun supporter ! On repart en voiture en tremblant et je me dis : ce nâest pas possible, ce nâest pas ce que je veux faire. Tu es un peu seul au monde, enfermé en dehors de chez toi. Je commence à me poser des questions, notamment des questions sur le sens que jâai envie de donner à ma carrière. Et je me rends compte que là , ça nâa plus de sens. Est-ce que je reste le bon petit mercenaire des familles ou est-ce que je construis quelque chose ? » Reste à trouver la planche de salut, le terrain dâexpression. Câest Didier Rose qui va lui offrir, dans des circonstances croustillantes, mais finalement tellement « limougeaudes ». Lâinfluent personnage au CSP est en effet lâex-agent de Bonato, avec lequel le joueur est à lâépoque en procès. Alors quand Rose le hèle, lâinternational français se rend en Limousin pour déblayer, pense-t-il, lâaffaire judiciaire. «La rencontre est surréaliste. Il me propose de revenir à Limoges, me parle de reconstruire, de ci et de ça. Câest la quatrième dimension. Je pensais que câétait pour la procédure ! Je lui donne mes conditions : un contrat à long terme, car jâai envie dâengagement, et être le capitaine du bateau. Je rentre à la maison, jâen parle à Lise (sa femme) et je me dis que câest dans la démarche, que cette équipe à reconstruire peut, naturellement, devenir mon équipe. Je dis banco. Je suis dans mes baskets, dans mon choix. Je rentre à Limoges pour donner du sens. » Il va faire bien plus que cela. Sur les ruines dâun club, dans lâintimité dâun vestiaire tourmenté qui se raccroche à ses mots, il va édifier une forteresse. Dusko Ivanovic, le coach, en est le gardien technique, Bonato en est lââme, le symbole, le porte-parole. Plus les jours rapetissent, plus lâespoir sâégrène, plus il occupe la place. Après un déplacement à Antibes fin janvier, le club semble pousser son dernier râle. Le président, Jean-Paul De Peretti, nây parvient plus et jette lâéponge. Sur le parking, dans sa voiture, Bonato, qui a claqué 26 points sur la Côte dâAzur la veille, passe une heure à le convaincre de se battre encore. Ses journées nâont plus de fin. Il est le premier à lâentraînement, lui le Cannois qui se baladait torse nu sous sa salopette à vingt piges et qui nâétait pas le plus acharné au travail avec Antibes. Un jour, lâAméricain Marcus Brown, laminé par les entraînements dâIvanovic, le genou gonflé, claque la porte en plein milieu dâune séance. Le coach sâinsurge : « Marcus a trahi le groupe, il ne reviendra pas », assène-t-il. Bonato le fixe et menace : «Si Marcus ne revient pas, le groupe sâarrête là . » Il est le lien, le relais médiatique, le psy, le remède, le fil de lâespoir. « Jâaurais été incapable de faire ce quâil a fait. Dépenser une telle énergie sur et en dehors du terrain. On sortait tous rincés des entraînements et lui repartait au téléphone, pour faire avancer les choses. La dépense dâénergie, le cerveau, lâaptitude quâil fallait avoir, ce nâest pas donné à tout le monde », relate son ex-partenaire David Frigout aujourdâhui. « Yann a été capable de nous faire traverser le pont. Il a fait le trait dâunion. Pour moi, il a joué le rôle de capitaine dans sa plus grande expression. Ce nâest pas facile. On a tous en nous une part dâégoïsme, pour être le gars qui va faire la différence. Câest normal. Ãtre capitaine, ce nâest pas un job facile, ça ne te rend pas populaire. Tu dois trancher, tu ne vas pas te faire aimer de tout le monde. Yann, cette année-là , a tenu ce rôle à la perfection », exprime Marcus Brown. Bonato ne subit rien. Au contraire, il sâabreuve. « Jâendosse ce rôle qui me nourrit», avoue-t-il maintenant. Sans arrière-pensées, pour protéger sa « tribu » et lui offrir la plus belle des aventures. Partout, les mots se chevauchent pour lui élever une statue. « Bonatâ » est un homme de la ville, qui aime prendre son café matinal sur les petites places du centre-ville de Limoges. Là , une vieille dame verse une larme et le prend dans ses bras, une autre lui offre une bouteille de vin, un pâté maison⦠Le vilain petit canard, comme il se définissait jadis, a quitté la mare. Bonato pense à ses hommes. Il ne bâtit plus sur du sable mais sur de folles idées. à lâimage de cette proposition de réduction de salaire quâil envoie, un jour dâhiver et de grosse tempête, à la face de ses partenaires dans le secret du vestiaire de Beaublanc. « Quand ça part en sucette, je me dis merde⦠On part dans lâirrationnel, la fête est finie. à ce jour, je ne sais toujours pas pourquoi jâai cette idée. Objectivement, câest un peu nâimporte quoi ! Câest totalement déraisonnable. Mais je crois que câest de lâamour. Et en amour, tu ne fais pas toujours que des choses raisonnables», estime-t-il aujourdâhui. Le vestiaire adhère, le groupe suit et ferme les yeux sur les mensonges de son capitaine. Car tous savent que Bonato leur cache des choses, pour la bonne cause. « Yann, câest notre leader. Câest notrecommandant, notre capitaine, celui quâon suit. Il y a de la manipulation, Yann nous a manipulés. On nâest pas dupes, mais on ne veut pas tout savoir. Il y a une confiance aveugle », raconte joliment, Jean-Philippe Méthélie, subjugué par la transformation dâun garçon sur lequel il a défendu par le passé et quâil ne reconnaît pas. « Yann au départ, câest un mec individualiste. Quand on le voit au début de sa carrière, on ne le soupçonne pas comme ça. Un gars comme (Laurent) Sciarra, meneur de jeu, il était plus typé pour ça. Jâai défendu sur lui quand il jouait à Paris. Le type, il voulait toutes les balles ! Là , il est dans lâabnégation et le don de soi, on ne peut pas faire mieux. » Son jeune équipier, Frédéric Weis, nâest pourtant pas étonné par la dimension collective de Bonato cette année-là . Il lâa côtoyé lors de son premier passage au CSP (1995-1997) et le pivot français avait décelé les bons germes. « Je ne suis pas surpris par lâattitude de Bonatâ. Ma première année à Limoges, câest lui qui mâemmenait tous les matins à lâentraînement et me posait le soir devant chez moi. Il a toujours été altruiste. En 2000, je lâai suivi très facilement car je savais âquâil ne me ferait pas de malâ », glisse Weis, dans un sourire. Bonato va emmener les siens au bout, vers un triplé magique, lui qui nâavait encore jamais décroché un seul titre collectif ! Dans un dernier acte presque symbolique, lui lâattaquant né va sâarracher comme un damné en défense sur Jay Larranaga, le shooteur de lâAsvel, lors du match dâappui qui sacre le CSP champion de France le 27 mai (66-78). La bouche ouverte, il cherche lâair, il nâen a plus. « à la fin, il avait des plaques dâhématomes qui sortaient sur ses jambes, comme ça, sans raison particulière, sans quâil nâait reçu de coups», se souvient Frigout. Le joueur est vidé, mais lâhomme est riche désormais. Lors de la présentation des deux équipes de France, peu de temps après dans un vaste auditorium, lâassemblée se lève et lâovationne. « Je me souviens, je ne suis pas bien. On vient de nous sanctionner (le club a été rétrogradé en Pro B) et ces mêmes gens mâapplaudissent. Tu sentais que lâon avait fait un truc et jâen étais le symbole », dit-il. Quelques mois plus tard, en quarts de finale des JO de Sydney face au Canada, le corps de Bonato va céder. Il se rompt le tendon dâAchille pour avoir tant donné. à lâAsvel, en 2002, il sera à nouveau champion de France. Mais la suite nâa plus rien à voir. « Ce titre avec lâAsvel, câest le devoir accompli », résume-t-il, en une phrase, sans autre émotion. Limoges, en revanche, câest tous les jours, à chaque instant. Bonato y vit, il est chef dâentreprise, à la tête de dix-sept salariés et de trois magasins franchisés Alain Afflelou. « Vivre, incarner une idée, un club, câest incomparable. Câest la bascule dans ma carrière, ma vie », confesse-t-il. 2000 est la flamme dâune vie, elle ne sâéteindra jamais⦠Mars 2000- mars 2020 - 20 ans de la Korac - Fireman - 09-05-2020 Merci d'avoir mis ça disponible. J espère que les dirigeants actuels feront quelque chose pour célébrer cette équipe quand la situation le permettra. Et pas dans 20 ans... |